Les erreurs courantes concernant jeux de société et cognition

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Les erreurs courantes concernant jeux de société et cognition

Les jeux de société sont souvent perçus comme de simples divertissements, mais ils jouent un rôle bien plus profond dans notre développement cognitif et social. Pourtant, de nombreuses idées reçues et erreurs persistent quant à leur impact réel sur notre cerveau. Dans cet article, nous allons démêler le vrai du faux et explorer les erreurs les plus courantes concernant les jeux de société et la cognition.

📚 Table des matières

Les erreurs courantes concernant

Croire que tous les jeux stimulent les mêmes fonctions cognitives

Une erreur fréquente consiste à penser que tous les jeux de société offrent les mêmes bénéfices cognitifs. En réalité, chaque type de jeu sollicite des zones différentes du cerveau. Par exemple, un jeu comme Dixit stimule principalement la créativité et l’expression verbale, tandis que Les Aventuriers du Rail fait davantage appel à la planification stratégique et à la mémoire spatiale.

Des études en neurosciences montrent que les jeux abstraits comme Quarto! activent fortement le cortex préfrontal, siège de la pensée logique, alors que les jeux narratifs comme Tales of the Arabian Nights sollicitent plutôt les zones liées à l’empathie et à la théorie de l’esprit. Il est donc crucial de varier les types de jeux pour un développement cognitif équilibré.

Un exemple frappant est la différence entre les jeux coopératifs et compétitifs. Les premiers favorisent les compétences sociales et la résolution collective de problèmes, tandis que les seconds développent davantage la prise de décision rapide et la gestion du stress. Une étude de l’Université de Genève (2021) a montré que les enfants jouant régulièrement aux deux types présentaient de meilleures performances dans divers tests cognitifs.

Sous-estimer l’importance du contexte social

Beaucoup pensent que les bénéfices cognitifs des jeux de société proviennent uniquement des mécaniques de jeu, négligeant totalement l’aspect social. Pourtant, les interactions humaines pendant le jeu jouent un rôle fondamental dans l’apprentissage et la mémorisation.

La psychologie sociale montre que le simple fait d’échanger des stratégies, d’expliquer ses choix ou de négocier avec d’autres joueurs active des processus cognitifs complexes. Une expérience menée par l’Université de Montréal a démontré que des groupes jouant ensemble montraient une meilleure rétention des règles et des stratégies que des individus jouant seuls contre l’ordinateur.

Le phénomène de « scaffolding » (étayage) est particulièrement intéressant : les joueurs expérimentés ajustent naturellement leurs explications aux novices, créant ainsi une zone de développement proximal idéale pour l’apprentissage. Cet aspect est totalement absent dans les jeux numériques solitaires.

Penser que plus un jeu est complexe, plus il est bénéfique

Une croyance répandue veut que la complexité d’un jeu soit directement proportionnelle à ses bénéfices cognitifs. C’est une erreur qui peut même avoir l’effet inverse, surtout chez les enfants ou les personnes âgées.

La théorie de la charge cognitive explique qu’au-delà d’un certain seuil de complexité, le cerveau est tellement occupé à gérer les règles qu’il ne peut plus se concentrer sur les aspects stratégiques ou sociaux. Des jeux comme 7 Wonders ou Terraforming Mars, bien que excellents, peuvent être contre-productifs pour des débutants.

Des recherches en psychologie éducative montrent que les jeux présentant une courbe d’apprentissage progressive (comme Carcassonne ou Kingdomino) permettent de meilleurs transferts de compétences vers la vie réelle. La clé réside dans le concept de « difficulté désirable » – un niveau de challenge optimal qui stimule sans submerger.

Négliger l’impact des émotions sur l’apprentissage

On oublie souvent à quel point l’aspect émotionnel influence les bénéfices cognitifs des jeux. Un jeu qui génère du stress, de la frustration ou de l’anxiété verra ses potentiels cognitifs grandement diminués, même si ses mécaniques sont excellentes.

Les neurosciences affectives ont montré que les émotions positives augmentent la plasticité synaptique, facilitant ainsi l’apprentissage. Un jeu comme Dixit, qui génère souvent rires et émerveillement, peut paradoxalement être plus bénéfique cognitivement qu’un jeu purement stratégique mais stressant.

L’effet « dopamine » joue également un rôle crucial. Les petites victoires régulières dans des jeux bien calibrés (comme Azul) créent des pics de dopamine qui renforcent la motivation et la mémorisation. À l’inverse, des jeux trop aléatoires ou punitifs peuvent générer de l’impuissance apprise.

Oublier l’importance de la régularité dans la pratique

Beaucoup croient qu’une seule partie occasionnelle d’un jeu complexe suffit à stimuler durablement la cognition. En réalité, comme pour tout apprentissage, c’est la pratique régulière et espacée qui donne les meilleurs résultats.

Des études sur la mémoire montrent que jouer 30 minutes plusieurs fois par semaine est bien plus efficace qu’une longue session mensuelle. Cela s’explique par le processus de consolidation mnésique qui nécessite des rappels espacés dans le temps.

La variété est également cruciale. Alterner différents types de jeux (un jour un jeu de mémoire, un autre jour un jeu de stratégie) permet de créer des connexions neuronales plus riches et plus flexibles. C’est le principe de l’ »apprentissage entrelacé », bien plus efficace que la répétition monotone.

Confondre corrélation et causalité dans les études

Une erreur méthodologique fréquente consiste à attribuer directement aux jeux de société des améliorations cognitives observées chez leurs pratiquants réguliers. Or, ces personnes ont souvent d’autres caractéristiques (niveau d’éducation, curiosité intellectuelle, vie sociale active) qui expliquent en partie leurs performances.

Les méta-analyses les plus rigoureuses (comme celle de Sala & Gobet, 2019) montrent que si les jeux améliorent bien les compétences spécifiques qu’ils sollicitent, les transferts vers d’autres domaines cognitifs sont limités. Par exemple, jouer aux échecs améliore la vision spatiale et la mémoire des configurations, mais pas nécessairement les capacités mathématiques générales.

Cela ne diminue pas pour autant la valeur des jeux de société, mais invite à une approche plus nuancée. Leur principal atout réside peut-être moins dans des gains cognitifs spectaculaires que dans leur capacité à maintenir une activité cérébrale variée et engageante tout au long de la vie.

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