Les impacts psychologiques de posture et humeur

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Notre corps parle, même lorsque nous nous taisons. La manière dont nous nous tenons, dont nous occupons l’espace, dont nous marchons, n’est pas qu’une simple affaire de squelette et de muscles. C’est un langage silencieux mais puissant qui influence en profondeur notre paysage intérieur. La relation entre notre posture et notre humeur est bien plus qu’une simple corrélation ; il s’agit d’une boucle de rétroaction complexe où le physique et le psyché s’influencent mutuellement, créant un cercle soit vertueux, soit vicieux. Comprendre cette dynamique, c’est s’offrir une clé puissante pour réguler volontairement son état émotionnel et renforcer son bien-être mental. Cet article explore en détail les multiples facettes de cette connexion fascinante.

📚 Table des matières

Les impacts psychologiques de posture et humeur

La posture comme reflet de l’état intérieur : Le corps, miroir de l’âme

Avant même d’examiner comment la posture peut changer l’humeur, il est essentiel de reconnaître qu’elle en est d’abord le témoin. Notre corps est le réceptacle de nos émotions, et il les exprime avec une franchise souvent plus grande que nos paroles. Une personne submergée par la tristesse ou la dépression aura tendance à adopter une posture dite de fermeture : épaules voûtées vers l’avant, dos courbé, tête baissée, regard fuyant, cage thoracique comprimée. Cette position n’est pas anodine ; elle est physiologiquement cohérente avec l’émotion ressentie. La tristesse pousse à un repli sur soi, une recherche de protection, et le corps se fait petit pour se protéger symboliquement des agressions extérieures. De la même manière, une personne anxieuse peut présenter des tensions musculaires visibles au niveau des épaules et de la nuque, une respiration superficielle et saccadée, et des gestes saccadés ou nerveux. La peur, quant à elle, peut figer la posture, rendant les mouvements raides et prudents. Ainsi, observer sa propre posture ou celle des autres offre une fenêtre précieuse sur l’état émotionnel du moment. C’est un diagnostic non verbal qui, s’il est correctement interprété, peut permettre une meilleure compréhension de soi et des autres.

La rétroaction corporelle : Comment la posture influence directement l’humeur

Si le corps reflète l’esprit, l’inverse est tout aussi vrai, et c’est là que réside le potentiel transformationnel de cette relation. Le principe de la rétroaction corporelle, popularisé par des recherches comme celles d’Amy Cuddy sur les « postures de puissance », postule que notre cerveau interprète les signaux envoyés par notre corps pour définir notre état émologique. En d’autres termes, adopter une posture associée à une émotion particulière peut déclencher les processus neurophysiologiques correspondants. L’exemple le plus frappant est celui de la posture de confiance : se tenir droit, épaules en arrière, poitrine ouverte, tête haute et sourire. Cette position envoie des signaux au système nerveux central indiquant qu’il n’y a pas de danger imminent. En réponse, le corps réduit la production de cortisol, l’hormone du stress, et peut augmenter celle de testostérone (associée à la dominance) et d’endorphines (associées au bien-être). Même sans en avoir initialement l’envie, le fait de forcer un sourire peut activer les muscles zygomatiques qui envoient un feedback positif au cerveau, légèrement améliorant l’humeur. Ainsi, en changeant volontairement notre posture, nous pouvons « tromper » notre cerveau et initier un changement d’état interne positif.

La confiance en soi et le langage non verbal expansif

Le lien entre une posture expansive et la confiance en soi est l’un des plus documentés en psychologie sociale. Une posture dite « de puissance » (power posing) consiste à occuper l’espace de manière affirmée : bras écartés sur les hanches, jambes écartées, torse bombé. Ces postures, souvent observées chez les athlètes victorieux ou les leaders charismatiques, ne sont pas seulement un signe de confiance affiché aux autres ; elles la génèrent véritablement chez celui qui les adopte. Des études en imagerie cérébrale ont montré que le fait de maintenir ces postures pendant seulement quelques minutes pouvait augmenter la prise de risque et la sensation de confiance en soi dans des situations stressantes, comme un entretien d’embauche ou une prise de parole en public. Le mécanisme sous-jacent est à la fois hormonal et cognitif. Sur le plan hormonal, comme évoqué précédemment, cela module les niveaux de cortisol et de testostérone. Sur le plan cognitif, adopter une posture de confiance modifie notre dialogue intérieur. Nous nous sentons plus grands, plus forts, plus légitimes, ce qui influence directement notre manière de penser et d’interagir. C’est un outil simple et immédiat pour booster son estime de soi avant un événement important.

Posture, stress et anxiété : Le cercle vicieux de la fermeture

À l’opposé, une posture de fermeture entretient et amplifie les états de stress et d’anxiété. Lorsque nous sommes stressés, nous avons naturellement tendance à nous recroqueviller : épaules remontées vers les oreilles, dos rond, bras croisés pour protéger le torse, tête rentrée. Cette position est une réaction archaïque de protection. Le problème est que cette posture comprime physiquement la cage thoracique et le diaphragme, limitant ainsi l’amplitude de la respiration. La respiration devient alors thoracique, superficielle et rapide, ce qui est un signal d’alarme pour le système nerveux autonome. Ce dernier, interprétant une respiration saccadée comme un signe de danger, active encore davantage la réponse de stress (le système sympathique), augmentant le rythme cardiaque et la tension artérielle. Nous entrons alors dans un cercle vicieux : le stress cause une mauvaise posture, qui elle-même aggrave le stress par le biais d’une respiration inefficace. Rompre ce cycle est fondamental pour la gestion de l’anxiété. Le simple fait de se forcer à redresser le dos, à abaisser les épaules et à prendre une profonde respiration abdominale peut suffire à envoyer un message de sécurité au cerveau et à calmer le système nerveux.

L’impact sur la cognition et la performance

L’influence de la posture ne se limite pas aux seules émotions ; elle s’étend à nos fonctions cognitives. Une posture avachie, courante à l’ère du numérique avec l’usage prolongé des smartphones et ordinateurs, a un impact négatif démontré sur la concentration, la mémoire et même l’humeur. Une étude célèbre a montré que les personnes assises droitement étaient plus susceptibles de se souvenir de souvenirs positifs et d’avoir des pensées plus optimistes que celles avachies. La raison pourrait résider dans l’activation de différents schémas neuronaux associés à chaque posture. Une posture droite favorise un état d’alerte et d’engagement avec l’environnement, propice à l’apprentissage et au traitement de l’information. À l’inverse, une posture affaissée est associée à la passivité et au désengagement. Sur le lieu de travail ou en contexte d’études, maintenir une bonne posture n’est donc pas qu’une question d’ergonomie physique pour éviter les douleurs ; c’est une stratégie pour optimiser ses performances intellectuelles. Se tenir droit devant son écran peut littéralement aider à rester concentré, à être plus créatif et à résoudre les problèmes plus efficacement.

Applications pratiques : Rééduquer son corps pour transformer son esprit

Connaître la théorie est une chose, l’appliquer en est une autre. Intégrer une meilleure posture dans sa vie quotidienne demande de la conscience et de la pratique. Voici quelques stratégies concrètes pour exploiter le pouvoir de la posture sur l’humeur. Premièrement, cultivez la conscience corporelle : plusieurs fois par jour, faites une pause pour scanner mentalement votre corps. Vos épaules sont-elles tendues ? Votre dos est-il rond ? Corrigez délibérément votre position. Deuxièmement, pratiquez des « micro-postures de puissance » : avant un coup de téléphone important ou une réunion, trouvez un endroit privé (comme les toilettes) et tenez une posture expansive pendant seulement deux minutes. Troisièmement, travaillez votre respiration : une posture droite est indissociable d’une respiration diaphragmatique profonde. Pratiquez régulièrement la cohérence cardiaque (inspirer 5 secondes, expirer 5 secondes) pour ancrer cet état. Quatrièmement, adaptez votre environnement : réglez votre chaise et votre écran à la bonne hauteur pour favoriser une position neutre du dos. Enfin, envisagez des pratiques corporelles comme le yoga, le Pilates ou la méthode Alexander, qui ont pour objectif central la rééducation posturale et la connexion corps-esprit. En prenant soin de votre posture, vous prenez soin de votre santé mentale.

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