Les mythes sur harcèlement au travail démystifiés

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Le harcèlement au travail est un phénomène complexe et malheureusement répandu, souvent entouré d’idées reçues qui brouillent sa compréhension. Ces mythes peuvent empêcher les victimes de se manifester, les employeurs de réagir efficacement et les collègues d’intervenir. Dans cet article, nous allons démystifier les croyances les plus tenaces sur le harcèlement professionnel, en nous appuyant sur des études psychologiques et des exemples concrets.

📚 Table des matières

Les mythes sur harcèlement

« C’est juste une blague » : La minimisation des comportements toxiques

L’un des mythes les plus répandus est que le harcèlement se résume à des plaisanteries ou des taquineries sans conséquences. En réalité, la répétition de comportements dévalorisants, même sous couvert d’humour, crée un environnement hostile. Une étude de l’INRS (2019) montre que 72% des victimes de harcèlement moral rapportent des « blagues » récurrentes visant à les humilier. Par exemple, un employé constamment moqué pour son accent ou ses méthodes de travail peut développer de l’anxiété, même si ses collègues prétendent « ne pas être méchants ». La psychologie sociale explique ce phénomène par la normalisation progressive de la violence verbale.

« Seuls les faibles sont harcelés » : Le stéréotype de la victime idéale

Cette croyance dangereuse suppose que le harcèlement ne touche que les personnes fragiles ou peu performantes. Or, les recherches en psychologie du travail (Leymann, 1996) démontrent que les victimes sont souvent des employés compétents, perçus comme une menace par leurs harceleurs. Un cas typique : une collaboratrice prometteuse isolée par des rumeurs parce qu’elle « dépasse trop les autres ». Le harcèlement sert alors de mécanisme de régulation sociale pour maintenir un statu quo. Les traits de personnalité comme l’empathie ou la créativité peuvent aussi devenir des cibles, indépendamment de la résistance psychologique de la victime.

« Le harcèlement vient toujours des supérieurs » : La hiérarchie mise en cause

Si le harcèlement vertical (manager-subordonné) est médiatisé, le harcèlement horizontal entre collègues représente 45% des cas selon la DARES (2021). Les dynamiques de groupe jouent un rôle clé : exclusion systématique lors des pauses, sabotage discret du travail, ou campagnes de dénigrement. Un exemple frappant est celui des « mobbing » dans les équipes soignantes, où des infirmiers expérimentés harcèlent les nouveaux pour « leur apprendre les règles non écrites ». Ces situations sont d’autant plus difficiles à identifier qu’elles ne passent pas par des ordres explicites.

« Si c’était grave, la victime porterait plainte » : Le silence des victimes

Le mécanisme psychologique de sidération (Hirigoyen, 1998) explique pourquoi 60% des victimes ne signalent pas les faits. La peur des représailles, la honte, ou la crainte de ne pas être crues paralysent l’action. Dans un cas documenté chez un constructeur automobile, un technicien a subi des insultes homophobes quotidiennes pendant 3 ans avant d’oser en parler – son agresseur était justement le délégué du personnel. Les neurosciences montrent que le stress chronique altère les capacités de prise de décision, créant un cercle vicieux d’inaction.

« C’est un problème personnel, pas professionnel » : La frontière entre vie privée et travail

Les employeurs invoquent souvent cette dichotomie pour éviter d’intervenir. Pourtant, la jurisprudence et la psychologie organisationnelle soulignent que tout comportement affectant la santé au travail relève de la responsabilité de l’entreprise. Un cadre harcelé par des messages nocturnes sur son téléphone privé subit bien une atteinte professionnelle. Les théories du « spillover » (reports d’émotions) décrivent comment ces agressions contaminent tous les domaines de vie. Une étude longitudinale (Eurofound, 2020) prouve que les victimes ont 3 fois plus de risques de développer des troubles conjugaux.

« Les politiques anti-harcèlement suffisent » : L’illusion des procédures

Afficher un protocole ne garantit pas sa mise en œuvre. Une méta-analyse (CIPD, 2022) révèle que 83% des signalements aboutissent à des mesures superficielles (changement de bureau plutôt que sanction). La psychologie des organisations met en lumière le « symbolic compliance » : les entreprises satisfont aux obligations légales sans changer leur culture. Exemple : dans une banque parisienne, le harceleur promu malgré 5 plaintes, car « trop performant ». Les solutions efficaces combinent formation continue, audits anonymes et redéfinition des indicateurs de performance managériale.

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