Quels sont les types de orientation professionnelle et comment les reconnaître

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Quels sont les types

Choisir une voie professionnelle est l’une des décisions les plus complexes et engageantes de notre existence. C’est un parcours souvent semé d’interrogations, de doutes, mais aussi d’opportunités passionnantes. Face à cette complexité, de nombreuses approches d’orientation professionnelle ont émergé, chacune portée par une philosophie, des méthodes et des objectifs distincts. Comprendre ces différents types d’orientation n’est pas qu’une question théorique ; c’est un prérequis essentiel pour identifier celle qui résonnera le plus avec votre personnalité, vos besoins du moment et votre vision de l’avenir. Cet article se propose de vous guider à travers le paysage riche et diversifié des modèles d’orientation, en décryptant leurs fondements, leurs processus et leurs signes distinctifs pour vous permettre de naviguer en toute conscience vers votre épanouissement professionnel.

L’orientation professionnelle traditionnelle : une approche structurée et normative

L’orientation professionnelle dite traditionnelle ou « différentielle » est le modèle historique, héritier des travaux de pionniers comme Frank Parsons au début du XXe siècle. Son postulat de base est que chaque individu possède un profil de compétences, d’intérêts et de personnalité unique, et qu’il existe des professions objectivement adaptées à ce profil. L’objectif est donc de réaliser la meilleure adéquation possible entre la personne et un métier, un peu comme une clé qui correspondrait à une serrure.

Cette approche est résolument structurée et s’appuie massivement sur des outils psychométriques standardisés. Le processus type commence presque toujours par une batterie de tests psychotechniques rigoureux. On retrouve notamment des tests d’aptitudes intellectuelles (raisonnement logique, verbal, numérique), des questionnaires d’intérêts professionnels très détaillés (comme le célèbre RIASEC de John Holland, qui catégorise les personnalités en six types : Réaliste, Investigateur, Artistique, Social, Entreprenant, Conventionnel), et des inventaires de personnalité. Les résultats sont ensuite comparés à de vastes bases de données métiers qui recensent les profils types requis pour exercer avec succès dans chaque domaine.

Comment reconnaître ce type d’orientation ? Plusieurs indices sont caractéristiques. La consultation est très cadrée, souvent sous la forme d’un protocole en plusieurs étapes bien définies (bilan, testing, restitution, recommandations). Le conseiller est perçu comme un expert qui interprète des données et émet un diagnostic. Le vocabulaire utilisé est celui de l’adéquation, de la compatibilité, des « métiers qui vous correspondent ». Les résultats se présentent fréquemment sous la forme d’une liste hiérarchisée de professions, parfois accompagnée de statistiques sur les débouchés et les salaires. Cette méthode est particulièrement rassurante pour les personnes qui recherchent un cadre clair, des réponses concrètes et une validation « scientifique » de leurs choix. Elle est très efficace pour ouvrir le champ des possibles à des métiers inconnus du consultant, mais elle peut parfois être perçue comme trop rigide, ne laissant que peu de place à l’intuition, à la subjectivité profonde ou au développement futur de la personne.

L’orientation développementale : un accompagnement sur le long terme

Contrairement au modèle traditionnel qui vise un « matching » à un instant T, l’orientation développementale considère le choix de carrière comme un processus évolutif qui s’inscrit tout au long de la vie. Inspirée des théories de Donald Super, cette approche postule que notre identité professionnelle n’est pas figée ; elle se construit, se transforme et mûrit à travers une série d’étapes et de transitions (croissance, exploration, établissement, maintenance, déclin). L’objectif n’est plus seulement de choisir un métier, mais d’apprendre à gérer son parcours professionnel de façon autonome et adaptative.

L’accompagnement en orientation développementale est un véritable travail sur soi dans la durée. Il ne se limite pas à une série de tests. Le conseiller utilise des entretiens approfondis pour aider la personne à retracer son histoire, à identifier ses schémas de fonctionnement, ses valeurs centrales et ses compétences transférables. Il l’aide à prendre conscience des étapes qu’elle traverse (par exemple, une transition de mi-carrière) et des défis spécifiques qui y sont associés. Les outils sont souvent qualitatifs : exercices de biographie professionnelle, analyses de situations de réussite, scénarios prospectifs, travail sur les représentations des métiers. L’accent est mis sur l’apprentissage de compétences à s’orienter : savoir s’auto-évaluer, rechercher de l’information, prendre des décisions, faire face à l’incertitude.

Vous êtes face à une approche développementale si l’accompagnement se déroule sur plusieurs séances espacées dans le temps, créant un espace de réflexion continu. Le conseiller se positionne moins comme un expert qui sait que comme un facilitateur qui questionne et aide à structurer la pensée. Les discussions portent sur le « comment » (comment je prends mes décisions ?) autant que sur le « quoi » (quel métier choisir ?). On vous parlera de « parcours de vie », de « projets évolutifs », et on vous invitera à envisager plusieurs scénarios possibles pour votre avenir. Cette méthode est idéale pour ceux qui vivent une période de remise en question profonde, qui envisagent une reconversion ou qui souhaitent simplement devenir les acteurs principaux de leur évolution professionnelle, capable de rebondir face aux changements du marché du travail.

L’orientation non-directive centrée sur la personne

Cette approche, profondément influencée par la psychologie humaniste et les travaux de Carl Rogers, place la relation d’aide au cœur du processus. Son principe fondamental est que chaque individu détient en lui les ressources et les réponses pour s’orienter. Le rôle du conseiller n’est pas de diriger, de conseiller ou de prescrire, mais de créer un climat relationnel sécurisant et empathique qui permettra à la personne d’exprimer librement ses conflits, ses aspirations et de trouver elle-même ses propres solutions.

La méthodologie est radicalement différente des modèles précédents. Elle repose presque exclusivement sur l’entretien non-directif. Le conseiller pratique une écoute active et inconditionnelle, reformule les propos pour en clarifier le sens, et fait preuve d’une congruence totale (il est authentique et transparent dans la relation). Il évite soigneusement les jugements, les interprétations sauvages et les conseils directifs. Il ne utilise pas de tests standardisés, car ceux-ci sont considérés comme une forme d’expertise externe qui pourrait entraver l’émergence de la vérité subjective du consultant. L’idée est que dans un cadre bienveillant et sans jugement, la personne peut contacter sa « tendance actualisante », une force interne qui la pousse naturellement vers son épanouissement et des choix qui sont cohérents avec son être profond.

Reconnaître une orientation non-directive est assez aisé. La séance peut sembler très libre, presque conversationnelle, mais elle est en réalité extrêmement cadrée par une éthique relationnelle stricte. Vous vous sentirez véritablement écouté et compris sans être jugé. Le conseiller vous posera des questions ouvertes pour vous aider à explorer vos sentiments (« Qu’est-ce que cela vous fait quand vous imaginez ce métier ? ») plutôt que des questions factuelles sur vos notes au baccalauréat. Vous ne repartirez pas avec une liste de métiers, mais probablement avec une meilleure compréhension de vous-même, de vos blocages et de vos motivations profondes. Cette approche est puissante pour les personnes qui se sentent perdues, sous pression familiale ou sociale, et qui ont besoin de se reconnecter à leurs véritables désirs avant de pouvoir faire un choix authentique.

L’orientation constructiviste et narrative : se construire par son histoire

L’orientation constructiviste et narrative représente un tournant majeur dans la conception du choix de carrière. Elle part du principe que la réalité n’est pas objective mais se construit socialement et subjectivement à travers le langage et les récits que nous produisons. Notre identité professionnelle n’est pas une essence à découvrir, mais une histoire que nous racontons et que nous pouvons réécrire. L’objectif de l’accompagnement est d’aider la personne à déconstruire les récits limitants qui l’enferment et à co-construire un nouveau récit professionnel plus porteur de sens et d’opportunités.

Les techniques utilisées sont créatives et narratives. Le conseiller, qui agit comme un co-auteur, peut inviter la personne à rédiger son autobiographie professionnelle en mettant en lumière les moments charnières, les personnages importants (mentors, modèles) et les fils conducteurs. Il utilise le questionnement pour externaliser le problème (« En quoi cette peur de l’échec dirige-t-elle vos choix ? ») et pour identifier les « moments d’exception », c’est-à-dire les situations où le problème n’était pas présent, pour comprendre ce qui fonctionnait déjà. Une méthode emblématique est la « carte de vie » (life designing), où la personne matérialise visuellement son parcours, ses espoirs et ses craintes. On travaille aussi sur les métaphores (« Si votre carrière était un voyage, où seriez-vous aujourd’hui ? ») pour ouvrir de nouvelles perspectives en dehors d’un raisonnement purement logique.

Les signes distinctifs de cette approche sont son côté créatif et collaboratif. L’espace de consultation peut ressembler à un atelier d’écriture ou de création. On vous demandera de raconter des histoires, de dessiner, de modéliser. Le langage est crucial : on analysera les mots que vous utilisez (« je suis bloqué », « je n’ai pas le choix ») pour en montrer l’impact et en proposer de nouveaux, plus empowerants. Vous serez considéré comme l’expert de votre propre vie, et le conseiller sera un facilitateur de sens. Cette méthode est particulièrement adaptée aux personnes en rupture de parcours, aux créatifs, ou à ceux qui sentent que les modèles traditionnels ne capturent pas la complexité de leur situation et qui cherchent à insuffler plus de cohérence et de sens narratif à leur histoire professionnelle.

L’orientation fortuite et le hasard planifié

Développée par John Krumboltz, la théorie de l’orientation fortuite (Happenstance) vient bousculer l’idée même que le choix de carrière est un processus purement rationnel et planifié. Elle postule au contraire que le hasard, les événements imprévus et les rencontres fortuites jouent un rôle majeur, et souvent bénéfique, dans la construction des parcours. L’objectif n’est donc pas d’éliminer l’incertitude, mais d’apprendre à la cultiver et à en tirer parti. Il s’agit de développer une flexibilité et une curiosité active pour transformer les accidents de la vie en opportunités professionnelles.

Contrairement aux autres modèles, l’accompagnement ne vise pas à trouver « LA » bonne voie. Il vise à préparer la personne à saisir le hasard. Le conseiller va travailler sur le développement de quatre compétences clés : la curiosité (explorer de nouvelles activités sans idée préconçue), la persistance (faire face aux obstacles), la flexibilité (s’adapter aux changements) et l’optimisme (voir le potentiel dans l’imprévu). Les actions concrètes sont privilégiées : on encourage la personne à multiplier les expériences nouvelles (bénévolat, stages courts, MOOCs sur des sujets inconnus, participation à des meetups), à élargir son réseau social de façon authentique et à analyser rétrospectivement les événements chanceux de sa vie pour identifier les conditions qui les ont permis.

Reconnaître cette approche est simple : elle est tournée vers l’action et l’expérimentation. Le conseiller vous challengera probablement pour sortir de votre zone de confort et vous poussera à générer vous-même des hasards heureux (« planified happenstance »). Au lieu de vous demander « Quel est votre plan ? », il vous demandera « Quelles nouvelles expériences allez-vous tenter ce mois-ci ? ». Les discussions porteront sur les rencontres intéressantes que vous avez faites récemment et sur la façon d’en tirer parti. Cette méthode est parfaite pour les profils entrepreneurs, les adeptes des « slasheurs », ou toute personne évoluant dans un environnement volatile et incertain où la capacité à pivoter et à saisir les opportunités est plus valuable que la fidélité à un plan rigide.

Comment reconnaître et choisir le type d’orientation qui vous correspond

Maintenant que ces grands modèles vous sont familiers, la question cruciale est : comment faire son choix ? La réponse n’est pas universelle ; elle dépend entièrement de votre personnalité, de votre situation et de vos besoins du moment. Voici un guide pratique pour vous auto-évaluer et identifier l’approche qui vous servira le mieux.

Commencez par une introspection honnête. De quel type de guidance avez-vous besoin ? Si vous êtes perdu et avez besoin de structure, de données tangibles et d’un cadre rassurant, l’approche traditionnelle pourrait être un bon point de départ. Si, au contraire, vous vous sentez étouffé par les attentes des autres et que vous avez besoin de retrouver un sentiment d’authenticité, l’approche non-directive pourrait vous libérer. Êtes-vous dans une phase de transition de vie complexe (reconversion, parentalité, etc.) ? L’approche développementale ou narrative vous offrira les outils pour donner du sens à cette transition. Envie d’agir et de tester plutôt que de réfléchir indéfiniment ? L’orientation fortuite sera votre alliée.

Observez aussi votre rapport à l’avenir. Croyez-vous en un destin professionnel unique à découvrir (ce qui pencherait pour les modèles différentiels) ou voyez-vous votre carrière comme une aventure à construire pas à pas, avec ses virages imprévus (modèles développemental, narratif ou fortuit) ? Analysez votre situation concrète : un étudiant de 18 ans qui doit faire un choix de formation initiale n’aura pas les mêmes besoins qu’un cadre de 50 ans en quête de sens après un licenciement. Le premier pourrait bénéficier de tests d’aptitudes, le second d’un accompagnement narratif profond.

Enfin, lorsque vous contactez un professionnel, n’hésitez pas à lui poser des questions directes sur sa méthodologie. « Utilisez-vous des tests psychométriques ? », « Comment se déroule typiquement un accompagnement avec vous ? », « Quelle est votre philosophie sur le rôle du hasard dans une carrière ? ». Ses réponses vous en diront long sur l’approche qu’il privilégie. Souvenez-vous qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise approche, seulement une approche plus ou moins adaptée à votre personne à un instant T. L’idéal est souvent de combiner les perspectives : utiliser un test pour ouvrir le champ des possibles (modèle différentiel) puis travailler sur le récit et le sens de ce choix (modèle narratif)


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